jeudi 22 mars 2018

Les pieds dans le sable


Aéroport de Bangkok, 11h, je descends de mon court vol en provenance de Siem Reap. Je m'engage dans la très cosmopolite et très longue file qui se forme devant les guichets de l'immigration. Il y a embouteillage dans cet entonnoir qui sert d'entrée à tout ce secteur d'Asie. Après trois quart d'heure d'attente je peux rejoindre mon pote Guillaume qui m'attend à la sortie, fraîchement débarqué de France. Il va m'accompagner pour cette quinzaine de jours dans le sud de la Thaïlande. Bangkok est immense. Rapidement les souvenirs de mon séjour ici il y a cinq ans refont surface. Et même de façon intrigante. Quand le taxi nous dépose devant notre hôtel, je reconnais les environs. Plus de doute, je vais loger dans la même rue que cinq ans auparavant. Curieuse coïncidence. L'environnement est toujours aussi glauque. Bars remplis d'occidentaux, masculins essentiellement, la cinquantaine en majorité, une pinte de bière en face d'eux et de jeunes thaïlandaises à leur côté. La même ambiance dérangeante. Notre séjour dans la capitale va se limiter à une journée. Le temps d'aller saluer le célèbre bouddha couché du Wat Pho et de faire une petite excursion en pirogue à moteur dans les canaux irriguant la ville. L'occasion de surprendre quelques clichés de vie quotidienne en navigant entre les habitations de fortunes posées sur l'eau. L'occasion aussi de faire la connaissance d'autres habitants, marins ceux là : les varans. Des gros lézards de deux à trois mètres, a priori inoffensifs pour l'homme, qui barbotent dans l'eau. En fin de journée, à pieds, nos passerons de manière assez déconcertante de zones touristiques remplies de bars, de salons de massages, de vendeurs ambulants et de chauffeurs de tuktuk à des secteurs résidentiels plus confidentiels. En frange du brouhaha touristique, on emprunte de minces ruelles et on se faufile dans ce Bangkok caché. Dans un univers nettement plus modeste, les gens subissent la journée, affalés sur une chaise, à l'ombre d'une bâche, collés à un ventilateur. Ils attendent on ne sait trop quoi. Peut être juste que le temps passe... Sur les axes routiers en revanche c'est l'effervescence. Cette folie urbaine ne m'avait pas manquée.

















De Bangkok nous traçons directement au sud, vers les plages et le soleil. Après un trajet de six heures en bus avec les locaux, nous arrivons dans la ville sans charme de Chumpon. De là, le lendemain, nous rejoignons Ko Tao, la première des îles de notre programme. Sur la façade est, trois îles sont en haut de la liste. Ko Samui (pour la fête), Ko PhaNgan et Ko Tao donc, la plus petite des trois et sur laquelle s'est porté notre choix. Il y a du monde dans le speed boat qui dessert l'île depuis le continent deux fois par jour. Nous débarquons, nous esquivons l'armée de rabatteurs et cheminons vers le nord de cette île qui doit faire cinq kilomètres de long sur un de large. Il y a pas mal d'animation et de touristes mais cela reste tout à fait supportable. Depuis sept mois, mon périple navigue entre tourisme et voyage, là il va rimer quelques temps avec vacances. Une fois les sacs posés et après avoir goûté l'eau chaude du Golfe de Thaïlande, il est temps de rêvasser et d'observer le soleil se coucher dans cet horizon marin, à la terrasse d'un bar, armés de mojitos. Ko Tao a du relief et la petite ballade du lendemain autour de l'île va se transformer en expédition. Mais la persévérance nous offrira une plage plus confidentielle où l'on peut se délasser au milieu de jolis poissons bariolés. Sur le retour, après avoir vaincu de fortes pentes nous profiterons d'un joli point de vue en hauteur sur cette petite enclave de verdure perdue au large des côtes thaïlandaises.





De retour sur le continent, il nous faut deux heures pour rejoindre l'autre côte du pays en minibus. Nous prenons ensuite place dans le dernier bateau à destination de Ko Phayam. Embarcation à taille humaine, une quinzaine de passagers seulement dont la moitié descendra à Ko Chang, première île sur la route. En arrivant à Ko Phayam on est bien loin de la frénésie de Ko Tao. Les deux îles doivent être assez proche en taille, mais ne présentent pas du tout le même développement. Nous débarquons sous un soleil déclinant et dans le plus grand calme. L'île est très verte et feuillue. Pas de voitures. On se déplace en scooter sur la petite route qui relie l’embarcadère aux différentes plages. Nous optons pour celle du nord. Après une assez longue marche lestés de nos sacs, nous prenons le premier hébergement disponible, un bungalow sommaire à quelques mètres de la plage. Un coin de paradis en mode Robinson Crusoé. Pas de wifi, une électricité qui va et qui vient. Après une nuit calme bercée par le roulement des vagues voisines nous décidons de monter légèrement en gamme et optons pour le complexe de bungalows voisin pour la suite du séjour. Tous ces logements desservent une longue plage où une poignée de chanceux profitent d'une baignade en toute tranquillité dans une eau matinale déjà bien chaude. Les plus paresseux roupillent à l'ombre des arbres sur des transats ou sont affalés dans le sable. On reste quand même à l'abri du soleil qui crame les épidermes. Finalement les plus nombreux sur cette plage ce sont les mini crabes blancs qui glissent à vive allure sur le sable et se réfugient dans des petits trous pour fuir la violence des tongs qui claque sur le sol. En bordure de ce décor de rêve on peut s’asseoir dans l'un des petits bars en bois et profiter d'un rafraîchissement, les pieds dans le sable, en accompagnant la descente du soleil. Un bar se détache des autres, le Hippie Bar. Un amas de planches en forme de coque de bateau qui invite à venir explorer le fond de sa cale tel un pirate en quête de rhum. Plus loin, sur la partie plus escarpée on retrouve une forêt tropicale assez dense et sauvage. En m'aventurant en bordure de celle-ci j'ai croisé une paire de toucans et une sorte de gros reptile qui venait juste de manquer de se faire écraser par un scooter. Ko Phayam m'a beaucoup plu. Son côté brut et paisible. La relative quiétude dans laquelle baignent aussi bien les touristes que les locaux. Une vrai parenthèse temporelle.








Nous descendons ensuite plus au sud, sur Phuket, la plus grande des îles thaïlandaises. Nous resterons sur la vieille ville loin de Patong et ses lieux de débauches. Nous rejoignons mon pote Greg que le travail a conduit ici (tournage d'un documentaire de voyage pour Arte). Nous dînerons avec une de ses collègues et leur guide pour la journée, un toulousain expatrié. Ce dernier nous ferra découvrir un très bon restaurant gastronomique, l’Éléphant Bleu, somptueusement installé dans l'ancienne demeure du gouverneur. Un moyen de fuir nos classiques pad thaï et riz fris. Hormis cette découverte culinaire, le cœur de Phuket n'offre pas grand chose pour satisfaire notre appétit culturel. On retrouve bien une architecture de style colonial inspirée d'une influence sino-portugaise, mais rien de transcendant. La petite agitation du marché de rue nocturne offrira toutefois une belle dernière touche. Les gens se pressent autour des multiples et variés stands de nourriture. Quelques animations musicales égaient notre traversée de la rue.





Nous retrouverons la beauté des plages thaïlandaises du côté de la province de Krabi. Une journée à musarder au bord de la plage d'Ao Nang et de sa voisine à Noppharat Thara, moins achalandée mais plus paisible. Une journée entre baignade, sieste et rafraîchissement à laisser le temps filer. Le lendemain retour à l'action. Nous privatisons une barque à moteur et partons en expédition vers les îles aux large. Ko Poda nous offre sable blanc et eau turquoise. La Thaïlande des cartes postales. Fin de journée sur Railay Beach. Beaucoup de monde qui grouille autour des immenses rochers karstiques plantés dans l'eau. Nous poserons nos serviettes en bout de plage prés de la grotte sacrée Princess Cave. Particularité des lieux : les locaux viennent y déposer des phallus en bois en guise d'offrande afin d'invoquer l'esprit de la grotte et faire des vœux de fertilité. Entre deux bains, nous observons la foule de touristes, en slip de bain, venir prendre des poses suggestives devant les sculptures évocatrices. Dans ce défilé de grotesque, j'observe une trio de thaïlandaises venues se recueillir. Aussi étrange qu'elle puisse paraître, une croyance reste une croyance et je trouve dommage que certains touristes n'arrivent pas à faire montre de respect.









Dans ce coin du pays, l'Islam se mêle au Bouddhisme. De l’extérieur, les deux religions semblent correctement cohabiter. En ville on retrouve à la fois des temples et des mosquées. Dans le Tuktuk qui me conduit vers la gare de bus, je fais face à deux mères de familles thaïlandaises. Elles ont des traits physiques assez similaires. Cependant, une porte un hijab et l'autre fait des gestes d'inclinaison à chaque fois que notre véhicule passe devant un temple. Une divergence religieuse qui ne semble pas altérer leur quotidien. A la gare routière je prends place dans un bus local à destination de Trang, dans les terres. J'ai abandonné Guillaume ce matin qui prenait le chemin du retour vers la métropole. Quant à moi, je vais m'accorder une journée off pour faire de la logistique, loin de l'agitation des plages. Un jour de vacance dans les vacances.

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