Il est temps de prendre
la route pour Jasper et de commencer le retour de ma boucle. A
l'aller j'avais emprunté la transcanadienne, l'autoroute qui
traverse le pays d'est en ouest. Au nord de celle-ci le trafic est
moins dense. Je fais la route parmi quelques pick-ups et camions
transportant des troncs d'arbres. La route longe la voie ferrée.
Ainsi, parfois, j'accompagne un train de marchandise chargé de ses
containers (les mêmes que j'ai eu sous les yeux pendant quinze
jours). Les wagons défilent, le
train semble infini. Il file entre les sapins tel un serpent
multicolore.
Jasper ressemble à s'en
méprendre à sa voisine du sud, Banff. Même noyau villageois de
chalets en pierre et bois regroupés autour d'une charmant centre
commerçant, et les montagnes qui bordent l'ensemble. La canyon
Maligne, les lacs Annette, Edith et Patricia, la rivière Muette. A
proximité on trouve de très jolies endroits. Avec l'expérience, je
sais dans quel sens et à quelle heure prendre les chemins pour
profiter égoïstement de cette nature. Où que l'on marche, on se
trouve toujours à proximité d'un ruisseau ou d'une rivière. Le
glissement de l'eau apaise les oreilles, et lentement polit les
galets et l'esprit.
L'avantage quand on a une
grosse voiture c'est qu'on peut prendre des auto-stoppeurs. J'ai
ainsi conduis deux tchèques (une frère et une sœur)
au point de départ de leur randonnée de deux jours. L'occasion
d'évoquer mes voyages antérieurs dans leurs pays et d'échanger
notamment sur Žižkov (quartier populaire de Prague)
et Blansko. A leur demande, je leur expliquais également que nous ne
parlions pas le même français que les québecois. Ou que du moins
nous n'avions pas exactement les mêmes expressions ni le même
accent. Après avoir récupéré quelques tuyaux sur Vancouver, je
les ai laissés, chargés comme des mules au pied de leur périple.
Mes excursions, elles, sont plus proches des promenades du dimanche.
Jasper aura été moins avare en présence animale que mes autres
points de chutes. Outre, les dynamiques et peu farouches écureuils,
j'ai eu la chance de croiser un wapiti, quelques biches et une mère
élan prenant un bain avec sa progéniture. Seul l'ours ne semble pas
vouloir daigner sortir de sa tanière.
Sur
mon circuit, j'ai gardé le meilleur pour la fin : la route des
glaciers qui relie Jasper à Banff. Trois cent bornes en pleine
nature à se faufiler entre les cimes canadiennes. Loin des lieux
habités, l'eau ruisselle des glaciers. Les débits prennent de
l'envergure. L'eau vire au blanc tumultueux. Ces cascades et rapides
cours d'eau irriguent cette terre sauvage et pure. C'en est la vie.
Au détour d'une cascade je suis tombé sur un texte anonyme qui
résume bien l'idée. « LE BRUIT ET L'ECUME. Ici
s'affrontent, dans le bruit et l'écume, les violentes eaux
rugissantes et la terre tremblante. Les échos assourdissants de
cette bataille sans fin étourdissent nos sens. »
A mi
chemin, je me suis approché d'une des origines de ce tumulte :
la fonte du glacier Althabasca. Ici, en hauteur, l'eau ruisselle
gentiment. Mais plus bas, le filet d'eau devient torrent. Et enfin,
de l'autre côté du versant, l'eau se fige à nouveau en une
multitudes de lacs aux couleurs somptueuses.
J'ai
conclus ma journée par les deux lacs présentés comme les plus
emblématiques des rocheuses canadiennes : le lac Louise et le
lac Moraine. Qui dit renommée dit foule. La route menant à ces deux
joyaux prend parfois des allures d’arrivée d'une étape de
montagne d'une course cycliste avec les voitures rangées sur les bas
cotés (il y a d'ailleurs quelques courageux qui tentent de
rallier les lacs à coup de pédales). Ma préférence se porte
sur le lac Moraine et la belle profonde couleur de son bleu au pieds
des montagnes enneigées. Le lac Louise n'en demeure pas moins
somptueux. Je rajouterais le lac Emerald, que j'ai fait à l'aller,
pour former un joli trio assez complémentaire.
Aujourd'hui,
journée de transition vers ma seconde partie canadienne :
Vancouver et sa région. Je retourne à Calgary pour rendre le tank
tout en pensant qu'en fin de journée je ferais le chemin inverse en
bus. Oui, je vais dérouler le petit millier de bornes en bus. Et de
nuit. Douze heures (onze en comptant ma neuvième heure offerte de
décalage horaire). Cela me rappellera aux bons souvenirs de mes
trajets au Pérou, en Bolivie et en Turquie (avec serveur en nœud
papillon à bord) ainsi qu'à ma jeunesse à sillonner les stades
de foot. Tout cela me laisse l'après midi à Calgary que je vais
finalement pouvoir parcourir. Au cœur des buildings, une large rue
piétonne dessert quelques commerces, bars et restaurants et s'achève
sur un énorme centre commercial. Pas de grand monument pour cause
d'histoire trop récente. La ville plantée au milieu du Canada par
excellence. Rien d'extravagant au final.
Nous
prenons la route en début de soirée. Les sommets enneigées se
confondent avec les nuages, puis au crépuscule lentement les
montagnes fusionnent avec le ciel. Et à mon tour je bascule dans le
sommeil.
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Cool comme trajet. Pour juste quelques jours passés dans les rocheuses, t'as pu voir déjà beaucoup d'endroits.
RépondreSupprimerYep. Après coup, le détour par Wells Gray était peu être dispensable, ça m'aurait permis de profiter plus de Banff et Jasper.
SupprimerBravo Lionel!!
RépondreSupprimerFait nous rêver...
On fait ce qu'on peut ;-)
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