Nous avons quitté
Barcelone à la nuit tombée, légèrement retardés par un problème
de poulie qui empêchait de relever la passerelle et qui a bien
mobilisé une grande partie de l'équipage sous nos yeux curieux.
L'animal s'est finalement élancé, tracté par deux remorqueurs.
Nous nous sommes éloignés de la capitale catalane à petite allure
mais non sans extraire un important panache de fumée qui lentement
enveloppa la ville dans une brume lointaine et la fit disparaître de
notre regard. Il y avait un vent frais mais la chaleur dégagée par
le moteur nous permettait de profiter agréablement de la monotonie
toute relative du paysage. Je suis resté ainsi un moment à observer
le ciel noir clair qui se dégageait de l'eau bleu sombre.
Après une nuit calme,
nous avons atteint Valence à l'heure du petit déjeuner. L'intendant
nous a informé que le bateau ne repartirait que le lendemain matin.
Nous projetons donc une visite de la ville après le repas de midi.
Dans la navette qui nous
conduit du bateau au poste de contrôle nous sommes accompagnés par
quatre membres d'équipages qui viennent de terminer leur temps sur
le Coral, et qui on le voit, ne sont pas mécontents de repartir chez
eux, à Bucarest et Colombo.
Valence est fidèle à
l'image que j'ai des villes espagnoles. Une cité massive mais
raffinée où la pierre blanche prédomine. Des bâtiments
d'envergure mais restant dans une architecture sobre et délicate.
Une multitude de rues ombragées et de places arborées offre un
refuge à la brutalité du soleil qui trône au dessus de la cité.
Suite à de trop de nombreuses inondations, il y a une quarantaine d'année, le fleuve qui traversait la ville a été détourné. Son ancien lit accueille aujourd’hui un parc richement végétalisé qui ceinture agréablement la ville. Valence abrite également un marché central au sein d'une halle magnifique. Un petit joyau qui me fait tristement penser au désastre qu'ont subi les halles de nos marchés toulousains.
Une belle dernière halte
européenne dans une ville qui m’était encore inconnue.
Ces premiers jours sur le
bateau m'ont permis de commencer à appréhender un autre quotidien.
Passer le temps, sur une chaise longue, à observer la vie
s'organiser à quai. Ne plus sursauter au énième bruit d'un
container déposé malhabilement. Gravir la flopée de marches qui
séparent la salle de restauration (niveau A) de nos appartements
(niveau E).
Mais aussi bizarre que
cela puisse paraître c'est dans cette période d'agitation, où les
gens s'activent autour du bateau et où l'on peut descendre à quai
que je ressens comme un enfermement. On se sent prisonnier avec le
bateau immobile. Il me tarde de passer le détroit de Gibraltar, pour
que sans retenu à quarante kilomètres heures nous parcourions, jour
et nuit pendant une grosse semaine, la distance qui nous sépare du continent
américain.
Je profite de ce qu'il me
reste de connexion pour glisser ce court billet. Le prochain sera du
nouveau monde.
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