Après deux longues
heures de descente sinueuse depuis les montagnes de Tanah Rata, mon
bus me dépose à Kuala Lumpur sur les coups de midi. Vraie première
ville « moderne »
depuis Bangkok puisque c'est en métro que je rejoins mon hôtel,
dans le quartier chinois. C'est de bonne humeur que je me lance, en
milieu d'après midi, dans l'exploration des alentours. Je commence
par l'édifice Sultan Abud Samad. Un bâtiment de moins de deux
siècles construit durant l'occupation britannique. Une jolie
construction de type mauresque. A deux pas de là, de l'autre côté
d'un petit canal, c'est une mosquée qui se fait toute petite entre
les buildings de grande hauteur. Rapidement à Kuala Lumpur on
s'aperçoit que tout se mêle : modernité, religion, business,
histoire... A peine une heure de visite que mon enthousiasme se
retrouve cependant douché au sens propre comme figuré. J'avais
naïvement sous estimé l'imposante averse quotidienne de fin d'après
midi. Je slalome entre les gouttes et progresse relativement au sec à
la faveur des arcades qui m'offre de sèches coursives. Je trouve
refuge au cœur du quartier chinois, dans Penang street.
Cette longue rue piétonne commerçante est en effet couverte, on
peut donc remonter les différents étals en bois à l'abri des
intempéries. En soi, rien de bien impressionnant ou dépaysant sauf
peut être si on aime les contrefaçons de t-shirts, chaussures,
sacs... Non, ce qui est marrant dans ce quartier, c'est de pouvoir
voir dans la même rue, un temple taoïste puis un temple bouddhiste
traditionnel faire face à un temple hindou à la façade colorée et
surchargée.
Le
lendemain je m'organise une petite boucle pédestre de la ville. Je
passe par le quartier indien pour me rendre au quartier d'affaire et
ses buildings rutilants dont les fameuses Petronas Tower,
véritable emblème du pays. Au
pied des tours on trouve un immense mall commercial que je traverse
afin de profiter de la fraîcheur de la climatisation. De l'autre
côté, je débouche dans un petit parc qui offre de belles vues sur
ces tours jumelles. Je passe ensuite par le quartier de Bukit
Bintang qui est vraiment la zone
commerciale de la ville. Ce coup-ci, j'ai bien minuté ma visite
puisque c'est de ma chambre d'hôtel, à peine rentré, que je
pourrai voir le ciel zébré d'éclairs se déchirer dans un
grondement impressionnant et déverser des trombes d'eaux dans des
rues encore fortement peuplées. Une fois la nuit tombée et le ciel
apaisé, je sors m'offrir un dernier repas dans la capitale. Je
choisi indien. L’occasion de malheureusement constater pour mon
palais que l'expression « peu épicée »
ne se comprend pas de la même manière entre français et indien.
Mon
étape suivante sera Malacca, charmante petite ville coloniale dont
le gigantesque centre commercial ne laisse pas de doute sur l'entrée
dans la modernité de la cité. Outre les traditionnelles shophouses
(les maisons accolées à arcade)
et les classiques quartiers chinois et indiens, ce qui marque à
Malacca c'est le quartier hollandais avec son église et ses
immeubles aux façades rouge. La Malaisie c'est ça, ces diasporas
indienne et chinoise qui cohabitent avec les malaisiens dans cet
héritage architectural laissé par les visiteurs
portugais, hollandais et anglais. Pas moins de cinq religions sont
ainsi assez visibles. Les églises, minoritaires mais ben présentes,
se dressent à côtés des temples (bouddhistes, taoïstes
et hindous) et des mosquées. A
mon sens, le plus beau monument de Malacca est d'ailleurs un édifice
religieux. De l'autre côté de la ville, sur une petite île
accessible par un pont, au bord de la plage, la mosquée Selat est
posée sur la mer. Elle repose à fleur d'eau, soutenue par des
piliers en béton. Je rejoins les quelques touristes sur la jetée
adjacente pour profiter du couché de soleil. A mesure que la clarté
baisse, des lumières vertes viennent colorer les façades blanches
de la mosquée. Le doux bruit monotone des vagues embellit le
tableau. Le calme enveloppe l'espace et d'un coup une voix monte dans
la nuit et transperce le silence. La brise porte vers l'horizon les
déclamations du muezzin. Les sonorités des prières musulmanes sont
magnifiques et ont quelque chose de très apaisant.
Le
lendemain je prends à nouveau le bus pour quitter la Malaisie et
regagner l'île-cité-Etat de Singapour, à trois heures de là. Ici
aussi le passage de frontière semble sans encombre. Mais j'ai décidé
de corser un peu la chose. Après une grosse de mi heure de queue, je
me présente au guichet sans avoir rempli au préalable le bordereau
d'admission, ce qui a le don d'irriter mon interlocuteur. Ce dernier
me tend ledit document et m'invite à retourner au bout de la queue
qui fait maintenant le double. A vue de nez, une heure supplémentaire
donc. Pas sur que le bus m'attende aussi longtemps. La policière du
guichet voisin a bien compris mon désarroi et aimablement traitera
mon admission et mettra fin à mon embarras.
La
fulgurante ascension de Singapour trouve naissance dans le
développement commercial initié par les anglais au XIXéme siècle
(à l'instar de Penang et Malacca). Cet important port
asiatique sera surnommé par la Couronne le Liverpool de d'Orient. La
ville sera le lieu de transit de nombreux produits et travailleurs.
Un essor qui se verra refroidit par la seconde guerre mondiale. De
1942 à 1945, la ville sera en effet occupée par les Japonais. C'est
donc au sortir de cette guerre, que cette ville marchande va devoir
s'inventer un avenir de nation autonome. C'est en visitant le musée
national que j'ai pu apprécié cette chronologie de Singapour, la
ville du lion.
Comme
ailleurs, nous retrouvons ici les quartiers chinois et indien, mais
en version nettement plus large. Viennent s'ajouter Kampong Glam,
le quartier arabe où trône au bout d'une rue piétonne une très
jolie mosquée et enfin, le quartier du centre et ses immenses
buildings aux lignes architecturales modernes mais sobres. Je réside
légèrement en marge, à l'est, dans le quartier de Geyland.
Ambiance assez populaire dans ce secteur mêlant indiens et chinois.
A chaque coin de rue on trouve une cantine ouverte sur la chaussée.
A toute heure de la journée, on croise des locaux assis autour de
tables en plastiques se délectant de plats plus épicés les uns que
les autres. L'endroit offre un bon rapport qualité/prix en terme
d'hébergement et une proximité du centre plus que correcte,
toutefois je ne croiserai que très peu de touristes ici.
A
Little India, je m'aventure dans le temple hindou central. Un
autre monde. Les gens baisent les marches, font tinter les cloches
des portes, se mettent à plat ventre et embrasse le sol tout en
tapotant celui-ci avec leur crâne et en marmonnant des prières. On
fait la queue à un guichet pour acheter des offrandes, on pratique
tout un cérémonial autour des différentes statues qui composent le
lieu. Au cœur du temple, on se presse pour apposer les mains au
dessus de bougies bénies par des moines en toges.
De l'autre côté
de la ville, en son cœur, au pieds des buildings et au bord de
l'eau, on retrouve le Merlion, statue d'un lion qui se pose
fièrement en défenseur de la skyline singapourienne. Il est
mitraillé à longueur de journée par les objectifs des touristes
qui se pressent sur l’esplanade. Chacun tenant absolument à
figurer sur un cliché souvenir. Comme à chaque fois, cela m'amuse
d'observer les touristes (essentiellement chinois) se mettre
ainsi en scène. De l'autre côté de la baie, se dresse un autre
monument emblématique : l'hôtel Marina Bay Sands. Le
fameux hôtel aux trois tours coiffées d'une toit en forme de
bateau. L'hôtel est la seule résurgence de ce coté-ci. En soi,
hormis le haut de l'édifice, rien de bien extraordinaire. Les trois
tours de l'immeuble sont en effet assez communes en terme
d'architecture. Ce qui doit être moins commun, ce sont les vues.
D'un côté on voit tout Singapour, et de l'autre on plonge sur le
gigantesque parc de Gardens by the bay. Dans cette vaste
étendue de verdure, au dessus de la canopée, émergent de drôles
de structures métalliques végétalisées en forme d'arbres: les
supertrees. La ballade est très agréablement et mènent vers
les deux grands dômes de verres situés à l’extrémité. Tels
deux globes d’insectes, ces sphères ultra-modernes (et
climatisées) offrent une ambiance « fleur »
et « forêt ». Tout est astucieusement pensé pour
que la promenade soit la plus agréable possible et proposent les
meilleures vues sur la multitudes d’essences proposées. La fin du
tour se termine par le passage dans un petit théâtre en sous-sol où
après nous en avoir mis plein la vue on s'adresse à notre cerveau
en diffusant plein de mini-clips sensibilisants sur l'impact de
l'activité humaine sur la nature. C'est assez bien fait et plutôt
intelligent, même si je trouve ça un peu démago quand on pense
qu'on se trouve dans une immense serre climatisée.
Je
profiterai d'être à Singapour pour finaliser les derniers
préparatifs de mon aventure. Après avoir acheté mon JR Pass qui me
permettra d'accéder à l'ensemble du réseau ferroviaire japonais,
je me dirige vers l'ambassade de Mongolie, située au dernier étage
d'un magnifique immeuble du début du XXème siècle. Je m'y rends
pour ma demande de visa. Ambiance feutrée, mobilier en bois, épaisse
moquette, mon aspect touriste dénote un poil dans ce cadre tourné
diplomatie. En effet, les singapouriens étant dispensés de visa
pour la Mongolie, l'ambassade n'est essentiellement visitée que par
des diplomates. Je dépose la paperasse (que j'ai bataillé pour
réussir à imprimer) et ma preuve de paiement (que j'ai
bataillé à faire dans une banque) à la secrétaire, à
l'accueil. J'ai du apporter la preuve d'un trajet de sortie du pays.
A la base je voulais tenter la Russie et m'y rendre en transsibérien.
Mais la manœuvre semble complexe. Il faut également un visa et je
ne suis pas sur de pouvoir réussir à faire à Tokyo ou à
Oulan-Bator. Je joue donc la sécurité et opte pour un vol à
direction de l'Europe. Mais je ne me vois pas finir mon voyage comme
ça, directement à l'aéroport de Toulouse-Blagnac. Ce serait trop
brutal. Je regarde donc les destinations possibles et opte pour le
nord et Helsinki. Cela me permettra de découvrir un peu la Finlande,
les pays baltes et la Pologne. Dans un peu moins de trois mois je
devrais donc être de retour en France. Encore un peu moins de cent
jours à profiter, et ça commence de suite par ma prochaine étape :
Bali en Indonésie.
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